- File une clope.

- Taxeur. - Elle lui tend. 

- J'sais qu'tu m'aimes - dit-il en s'marrant et en attrapant le petit cylindre.

- Ta gueule, j'aime personne. 

- Fais pas genre t'as pas d'cœur. On sait très bien tous les deux qu't'es une guimauve. 

- J't'emmerde. Arrêtes tes conneries. J'ai coupé les ponts avec ma famille, j'me suis cassée d'chez moi, j'ai planté des couteaux dans l'dos à bon nombre de gens, j'crache sur les gosses et j'béger sur les histoires d'amour alors viens pas m'parler d'guimauve.

- J't'ai tendu la main et tu l'as attrapée comme une noyée.

- Tu veux t'donner l'beau rôle ? T'es qu'un connard de menteur. On était deux à s'noyer et maintenant on s'entraîne tous les deux vers le fond. 

- J'vois pas d'quoi tu parles.

- Mais arrêtes d'être aveugle bordel ! Il est 4 heures du mat', on zone dans des rues désertes en buvant des bières bon marché et en fumant comme des pompiers. On sait pas c'qu'on va faire demain ni tous les jours d'après. Comme toujours, on va finir par traîner nos carcasses dans quelques endroits miteux pour pioncer entre deux tours de manche. On fait que errer comme deux paumés en niquant not'vie. 

- Vas-y alors, casse-toi. Retourne dans ta p'tite vie minable avec la maison, l'emprunt, le boulot minable et tout l'bordel. Y'a qu'ça qui t'attend chez tes parents. Retourne agoniser dans ta merde. Retourne te faire niquer par la vie.

- C'est toi qu'a la came. 

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"- Oh, t'es gauchère 

- Bravo ! Quelle observation !"

"- On est quel jour ?

- Ouvre les yeux, c'est marqué au tableau."

"- T'aurais un stylo ?

- Nan, j'écris qu'à la plume."

"- Lapin, c'est "ain" ?

- Et "J'vais t'foutre un pain", c'est "in" ?"

"- T'as de grands yeux !

- T'as un grand nez.

- ...

- Ah nan, mais t'inquiète, c'est un compliment."

"- Et donc, en suivant ce raisonnement on peut dire que...

- Nan mais c'est bon on sait, on a compris. C'est la base.

- ...

- Ou pas..."

"- On t'a jamais dit que t'étais désagréablement hautaine ?

- La vie est plus facile à avaler quand on la prend de haut."

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   Elle rentre de soirée. Elle marche dans la rue, encore un peu éméchée, le maquillage qu'a bavé. Elle veut rentrer, elle est fatiguée. Elle attend l'bus, allume une clope, se perd dans ses pensées confuses. Sous son crâne c'est l'anarchie pourtant son visage reste sans expression. Morte vivante, c'est c'qui la définirait le mieux. Elle a oublié sa musique. 

- Hey, salut t'as pas une clope à m'dépanne ?

Elle voudrait pouvoir l'ignorer, il la fait chier.

- Nan. Désolée.

- Oh, allez, vas-y fait pas ta pute

- Nan, vraiment désolée, j'ai plus d'tabac.

   Il s'éloigne en l'insultant. Pute. Salope. J'vais t'baiser connasse. 

   Le bus arrive, elle monte. Attend. Et rentre chez elle. Elle s'écroule dans son lit. elle se réveillera sans souvenirs de la veille. Seulement une sensation désagréable qui la f'ra se sentir mal. Elle est rentrée, plus ou moins sans problèmes, c'est l'principal. Toute façon y'a personne pour la raccompagner, personne pour s'assurer qu'ça va. C'est ça quand on est juste une meuf de soirée. Personne pour s’inquiéter. T'existes pas or du moment.

   Évapores toi dans les lueurs nocturnes, ça vaut mieux. 

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- T'es contente ? T'as eu c'que tu voulais?

- Même pas j'crois.

- T'es bourrée et t'en r'demande ?

- Ta gueule. je plane.

- Tu m'dégoûte.

- Fuck it.

- J'me casse, démerde toi.

- T'inquiète. j'ai l'habitude.

Et elle t'abandonne. Et te laisse avec ta bouteille et ta solitude. Cette solitude tant souhaitée et tant redoutée. Elle part sans un regard. Ouais, elle s'en fout. C'est pas c'que tu voulais ? Tu fais fuir les gens, tu l'sais. Tu leur fais peur. Tu les brise et tu t'détruis en même temps. Parce que malgré c'qu'on pourrait penser, t'as un cœur. T'as un cœur qui saigne. Mais t'as tellement peur d'en avoir un que tu fais semblant d'pas en avoir. Et tu t'brises, tu t'anéantis dans cette fausse certitude. Tout c'que tu touches meurs et deviens désert. Tu t'retrouves seule. Tu t'blesses encore et encore. Tu chasses tout c'qui pourrait te détruire. Mais tu pourras jamais te débarrasser de toi-même.  

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- Qu'est-ce que tu fais là ?

- J'profite de la vue.

- Tu sais que c'est interdit ?

- Qu'est-ce que toi tu fous là alors ?

- J'suis venu t'chercher.

- J'peux savoir pourquoi ?

- Parce que tu m'manquais.

- Arrêtes de déconner, s'te plait. J'ai pas envie d'rigoler.

- J'voulais vérifier qu'tu t'fasses gauler.

- Là j'veux bien t'croire. Va t'faire foutre.

- Pourquoi tu préfères les mensonges ?

- Parce qu'eux au moins j'les choisis. C'est ma réalité. 

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